Rien qu’à l’accent chantant, on comprend tout de suite que Jean-Marie Bony est un Méditerranéen. Il a grandi dans le sud-est, et a passé sa carrière à proposer aux viticulteurs, producteurs de fruits et maraîchers du Gard et de l’Ardèche des produits chimiques qui devaient les aider à améliorer leur production. Quarante ans plus tard, à 67 ans, la voix chante toujours, le sourire s’entend encore, mais deux cancers sont passés par là.
« J’ai des colères à dire »Aujourd’hui, Jean-Marie Bony passe cinq heures, trois fois par semaine, en dialyse. « Les conséquences de la chimio. » Mais cela ne l’empêchera pas de venir à Brioude, samedi 3 octobre prochain, pour dire sa colère, mais aussi son courage. Pour raconter ses dix années de combat pour faire reconnaître son cancer comme maladie professionnelle par la Mutualité sociale agricole (MSA). Pour, aussi, donner le courage à ses camarades de souffrance de suivre ses traces.
La manifestation De la terre et des hommes, qui avait été lancée l’an dernier à Brioude, revient cette année en se penchant plus précisément sur les produits phytosanitaires. Outre une après-midi dédiée aux techniques alternatives à ces produits, la quinzaine se terminera samedi 3 octobre par la projection du film La mort est dans le pré, et par le témoignage de Jean-Marie Bony.
Ce dernier reviendra notamment sur le temps qui lui a fallu pour être reconnu comme une victime des produits phytosanitaires. « Pour le premier cancer, en 1993, je n’ai pas fait le lien, se souvient-il. En 2002, ils ont trouvé un lymphome. Le professeur m’a demandé “qu’avez-vous fait de votre vie??” Je lui ai dit “moi, j’ai touché aux pesticides, ça a été mon boulot”. Il m’a conseillé de faire un dossier… »
Jeudi dernier, Jean-Marie Bony a appris que son camarade Paul François, qui fait partie lui aussi de l’association Phyto victimes, venait de gagner son combat face à Monsanto. Il en a été « très content », et cela ne fait que l’encourager. « J’ai des colères à dire. Il faut que ceux qui sont malades, aujourd’hui, se défendent. Il y en a qui s’en foutent, d’autres qui me disent que c’est compliqué… Je connais un agriculteur qui a 70 ans. Il en est à son septième cancer, mais il hésite à se faire reconnaître, devant la difficulté du parcours. » Accompagner les victimes d’aujourd’hui est une chose, protéger la jeune génération en est une autre. « On s’est fait connaître dans les écoles agricoles, et aujourd’hui les jeunes nous disent “moi je ne veux pas tomber dans la maladie”. »
Pomme Labrousse