Thierry Rascle est représentatif de la diversité du monde paysan. La réflexion est au centre de sa démarche, nourrie de philosophie et de bon sen. Un homme en phase avec sa conscience. Questionné sur son métier d’agriculteur, il explique préférer le terme de paysan. « Je me suis installé au « Brononcel », commune de Paulhaguet en 2000 après avoir galéré pendant 3 ans pour trouver une exploitation. Lorsqu’on n’est pas issu du milieu agricole c’est une gageure. »
« Être libre » Thierry Rascle prend donc la suite d’un autre paysan, fait beaucoup de travaux et opte pour l’élevage ovin-lait, des brebis lacaune (celles qui font le fameux Roquefort). « Je me suis levé un matin est j’ai décidé que je serai paysan. Je voulais être libre, indépendant et habiter à la campagne, dans un endroit reculé. »
Son exploitation s’étend sur 34 hectares pour ses 120 brebis. La bergerie, quelques bâtiments de stockage, un atelier de fabrication et assez peu de matériels agricoles complètent la ferme. « Je suis installé en agriculture biologique depuis le début, cela n’était pas négociable. Je dispose de prairies naturelles et temporaires et de parcours. J’ai cinq béliers reproducteurs en monte naturelle. Je garde 25 % des agnelles afin de renouveler mon cheptel, le reste est vendu. Mes brebis meurent ici, je leur dois bien cela. »
Thierry Rascel produit du lait, le transforme en fromages pour une vente directe sur le marché du Puy-en-Velay. Il livre également les biocoops d’Aiguilhe et de Brioude, quelques restaurants et vend ses produits à la ferme. Entre les travaux des champs, les périodes d’agnelage, la fabrication, la tonte, il ne s’ennuie guère…
« Mes brebis meurent ici,
je leur dois
bien cela » « Mon exploitation est à taille humaine, mais cela ne l’empêche pas d’être chronophage. C’est dû à la charge de travail qu’impose la transformation du lait. Cela restreint la liberté. À 46 ans, on se rend déjà compte que le temps file vite. J’aime ce que je fais mais l’avenir reste ouvert… Jusqu’à la retraite, plein de choses peuvent se passer. »
Pour cet éleveur atypique, la paysannerie a un avenir. Mais pas n’importe lequel. « Dans nos territoires, il y a de la place mais il est important d’être le plus indépendant possible. Il y a eu des précurseurs dans les années soixante-dix, en particulier en ce qui concerne l’agriculture biologique, ils avaient la foi et ils ont été visionnaires, on leur doit beaucoup ! » Pour autant, le bio ne résoudra pas tout, à ses yeux. « Il faut nous questionner sur le cahier des charges, sur le bio à deux vitesses (entre petits producteurs et grande distribution), sur son éthique ! »
Thierry Rascle rêve de concitoyens « vigilants, qui s’interrogent sur le monde, qui s’informent : des citoyens actifs et responsables de ce qu’ils mangent ! Éveiller la conscience des consommateurs aux conditions de vies des animaux… Il y a des indicateurs encourageants comme la solidarité entre les paysans, d’autres le sont moins… »