Source : La Montagne – 22 janvier 2014
Porté par cinq éleveurs, un atelier de découpe et de transformation a ouvert, hier, rue Guynemer
Un atelier de découpe et de transformation de viandes bio a discrètement ouvert ses portes, hier, à Brioude. Une naissance qui ravit ses cinq parents, tous producteurs locaux.
Hier matin, le bâtiment boisé situé rue Guynemer s’est timidement éveillé. Derrière les portes d’un ensemble réfrigéré de 450 m2, Jacqueline Gibelin, Monique Brun-Bellut, Serge Douix, Pascal Rouy et Émilien Piroux effectuaient leurs premiers pas brivadois, coiffés de charlottes et chaussés de larges bottes blanches. Ces cinq ambassadeurs du bio affichaient un large sourire à l’ouverture de leur atelier de découpe et de transformation de viandes. Une première à Brioude !
Une naissance heureuse portée par des parents aux personnalités panachées. « Il faut bien avouer que l’on parle de cette idée de s’unir depuis plus de dix ans. Les jeunes, Émilien et Pascal, nous ont tirés en avant », confesse la timide Jacqueline Gibelin, 60 ans, spécialisée dans l’élevage de porc à Vézézoux. Un avis partagé par la deuxième féminine de l’équipe, Monique Brun-Bellut, reconnue pour la qualité de ses moutons noirs du Velay. « À 62 ans, c’est une nouvelle expérience de vie qui s’ouvre à nous. On va finir notre carrière en ayant touché à tout. On va enfin pouvoir maîtriser la transformation de nos produits, c’est une sécurité. Même si on est conscient de la surcharge de travail engendrée… »
Côté messieurs, le goût d’une union pratique et efficace comble les papilles. « Jusqu’à aujourd’hui, on galérait tous à aller à droite à gauche, à Saint-Flour, Craponne et dans le Puy-de-Dôme, pour faire découper nos bêtes. Depuis peu, l’abattoir de Brioude propose une prestation de découpe, mais il est surchargé et les options sont limitées », précise Pascal Rouy, le quadra du groupe.
De la fourche à la fourchette
Si la mutualisation de la découpe a aiguisé les appétits, la valorisation des produits sur place a raflé les suffrages. Serge Douix, le « vieux bio » de l’équipée, savoure le moment. « Jusqu’ici, on nous découpait nos animaux. On n’avait aucune maîtrise des produits, ni de nos revenus. Maintenant, on va pouvoir travailler notre production de la ferme à l’assiette ! Pour moi qui suis dans le métier depuis trente ans, j’arrive à une finalité avec ce système collectif. » Une valeur ajoutée qui a décidé Émilien Piroux, jeune pousse bio de 29 ans, à emboîter le pas. « On va pouvoir valoriser nos recettes et vendre des produits que l’on connaîtra par c’ur puisqu’on les aura réalisés de A à z. Le rapport direct au client est plaisant et c’est un gage de qualité.». Un système gagnant-gagnant pour les éleveurs et les clients que détaille Pascal Rouy. « En travaillant en direct, on supprime les intermédiaires, les marges et les prix sont compétitifs. On peut désormais manger du bio local pas plus cher que le conventionnel » Amateur de bons mots, l’agriculteur d’Azerat laboure les clichés. « La mention bio, ce n’est plus le hippie entouré de ses trois moutons. Ce sont des exploitations de qualité, de la rigueur, de la technicité et un savoir-faire très contrôlé. On est tous unis par un état d’esprit. Le bio est un renouveau, une manière de repenser notre métier ».
Dans six mois, l’atelier de découpe devrait recevoir l’agrément européen qui autorise le traitement de prestations extérieures. Les cinq associés préviennent : « Nous proposerons un service de découpe et de préparation de produits cuisinés à la condition d’élever du bio ». À plus court terme, une salle de présentation des produits et de retrait des colis devrait rapidement accueillir curieux et gourmands.
Pertinente, la SARL des Paysans d’Auvergne a été soutenue à hauteur de 200.000 € (sur un total de 600.000) par des aides régionales, départementales et européennes. À moyen terme, elle devrait recruter un boucher, un traiteur, un administratif et créer des emplois agricoles. Pour les plus anciens, c’est la promesse de pouvoir transmettre une exploitation valorisée et un savoir-faire légué sur place.
Carole Eon-Groslier